Théorème de Bolzano-Weierstrass

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Pour les articles homonymes, voir Théorème de Weierstrass, BWT, TBW et Bolzano.

En mathématiques, et plus précisément en analyse réelle, le théorème de Bolzano-Weierstrass, nommé d'après les mathématiciens Bernard Bolzano et Karl Weierstrass, énonce

Toute suite réelle bornée contient une sous-suite convergente.

ce qui peut se reformuler en termes de valeurs d'adhérence :

Toute suite réelle bornée a au moins une valeur d'adhérence.

Le théorème s'exprime également sous une forme plus topologique :

Toute partie fermée bornée de R {\displaystyle \mathbb {R} } est séquentiellement compacte.

Enfin, on peut généraliser le théorème à R n {\displaystyle \mathbb {R} ^{n}} , ou encore à tout espace vectoriel normé de dimension finie sur R {\displaystyle \mathbb {R} } .

Démonstration (cas réel)

Il existe au moins deux démonstrations usuelles de ce théorème.

La première fait appel à l'extraction d'une suite monotone. Considérons une suite réelle bornée. Elle admet une sous-suite monotone (cf. propriétés des sous-suites), qui est également bornée. Par le théorème de la limite monotone, cette sous-suite converge.

La seconde preuve s'appuie sur une dichotomie[1],[2],[3]. Soit ( u n ) {\displaystyle (u_{n})} une suite réelle bornée. Soit un minorant m {\displaystyle m} et un majorant M {\displaystyle M} de ( u n ) {\displaystyle (u_{n})} . On pose m 0 = m , M 0 = M {\displaystyle m_{0}=m,M_{0}=M} . Notons d 0 = ( m 0 + M 0 ) / 2 {\displaystyle d_{0}=(m_{0}+M_{0})/2} le milieu de l'intervalle [ m 0 , M 0 ] {\displaystyle [m_{0},M_{0}]} . Tous les termes de ( u n ) {\displaystyle (u_{n})} sont dans [ m 0 , M 0 ] {\displaystyle [m_{0},M_{0}]} , et il y en a une infinité, donc il y en a une infinité dans au moins l'un des deux intervalles [ m 0 , d 0 ] {\displaystyle [m_{0},d_{0}]} et [ d 0 , M 0 ] {\displaystyle [d_{0},M_{0}]} . Itérons le processus : posons m 1 = m 0 , M 1 = d 0 {\displaystyle m_{1}=m_{0},M_{1}=d_{0}} ou m 1 = d 0 , M 1 = M 0 {\displaystyle m_{1}=d_{0},M_{1}=M_{0}} de sorte qu'il y ait une infinité de termes de ( u n ) {\displaystyle (u_{n})} dans [ m 1 , M 1 ] {\displaystyle [m_{1},M_{1}]} , et posons d 1 = ( m 1 + M 1 ) / 2 {\displaystyle d_{1}=(m_{1}+M_{1})/2} le milieu de [ m 1 , M 1 ] {\displaystyle [m_{1},M_{1}]} . À nouveau, il y a une infinité de termes de ( u n ) {\displaystyle (u_{n})} dans [ m 1 , d 1 ] {\displaystyle [m_{1},d_{1}]} ou dans [ d 1 , M 1 ] {\displaystyle [d_{1},M_{1}]} , et on peut continuer infiniment. Les suites ( m n ) {\displaystyle (m_{n})} et ( M n ) {\displaystyle (M_{n})} sont adjacentes car ( m n ) {\displaystyle (m_{n})} est croissante, ( M n ) {\displaystyle (M_{n})} est décroissante et l'écart entre les deux est divisé par 2 à chaque étape. Par le théorème des suites adjacentes, elles convergent vers une limite commune l {\displaystyle l} . On pose φ ( 0 ) = 0 {\displaystyle \varphi (0)=0} , et pour tout n {\displaystyle n} , on choisit φ ( n + 1 ) {\displaystyle \varphi (n+1)} comme le plus petit entier strictement supérieur à φ ( n ) {\displaystyle \varphi (n)} tel que u φ ( n + 1 ) {\displaystyle u_{\varphi (n+1)}} appartienne à [ m n + 1 , M n + 1 ] {\displaystyle [m_{n+1},M_{n+1}]} , ce qui est possible car une infinité de termes de ( u n ) {\displaystyle (u_{n})} appartiennent à [ m n + 1 , M n + 1 ] {\displaystyle [m_{n+1},M_{n+1}]} . Alors, par le théorème des gendarmes, la suite ( u φ ( n ) ) {\displaystyle (u_{\varphi (n)})} extraite de ( u n ) {\displaystyle (u_{n})} tend vers l {\displaystyle l} .

Généralisation aux ℝ-espaces vectoriels normés de dimension finie

Le théorème s'applique toujours en remplaçant R {\displaystyle \mathbb {R} } par un R {\displaystyle \mathbb {R} } -espace vectoriel normé de dimension finie. En particulier, il est vrai dans C {\displaystyle \mathbb {C} } muni du module complexe.

Cette généralisation peut se prouver à partir du cas réel. Soit un R {\displaystyle \mathbb {R} } -espace vectoriel normé de dimension finie d {\displaystyle d} , assimilé sans perte de généralité à R d {\displaystyle \mathbb {R} ^{d}} muni d'une norme {\displaystyle \lVert \cdot \rVert } , et soit une suite bornée de vecteurs. On remarque que la suite des premières coordonnées est bornée. En appliquant le théorème dans le cas réel, on extrait une sous-suite de vecteurs telle que les premières coordonnées convergent. On extrait alors de cette sous-suite une sous-sous-suite qui fait converger les deuxièmes coordonnées des vecteurs, et ainsi de suite jusqu'aux d {\displaystyle d} -ièmes coordonnées. La sous-suite ainsi obtenue converge dans R d {\displaystyle \mathbb {R} ^{d}} .

Lien avec la compacité

Une généralisation du théorème affirme qu'un espace métrisable X est compact (au sens de l'axiome de Borel-Lebesgue) si (et seulement si) toute suite d'éléments de X admet une valeur d'adhérence dans X ou, de manière équivalente, admet une sous-suite qui converge vers un élément de X.

Cet énoncé peut se décomposer en :

  • Deux scholies qui garantissent le « seulement si » :
  • L'énoncé proprement dit, le « si » :

Tout espace métrisable séquentiellement compact est compact.

(Un espace séquentiellement compact est un espace dans lequel toute suite admet une sous-suite convergente.)

Démonstration

Tout espace métrique X séquentiellement compact est évidemment précompact, c'est-à-dire que toute suite dans X admet une sous-suite de Cauchy ou, ce qui est équivalent : pour tout r > 0, X est recouvert par un nombre fini de boules de rayon r.

Pour en déduire qu'il est compact, il suffit d'utiliser les liens généraux entre diverses notions de compacité : puisque X est précompact, il est séparable donc à base dénombrable donc de Lindelöf, c'est-à-dire que tout recouvrement ouvert ( U i ) i I {\displaystyle \left(U_{i}\right)_{i\in I}} de X admet un sous-recouvrement dénombrable ( V n ) n N {\displaystyle \left(V_{n}\right)_{n\in \mathbb {N} }} . Puis, en utilisant à nouveau la compacité séquentielle, ( V n ) n N {\displaystyle \left(V_{n}\right)_{n\in \mathbb {N} }} a un sous-recouvrement fini (sinon, on pourrait choisir, pour tout n, un point x n k < n V k {\displaystyle x_{n}\notin \cup _{k<n}V_{k}} , et la suite ( x n ) {\displaystyle (x_{n})} n'aurait pas de valeur d'adhérence).

Une autre approche, plus spécifique, est d'utiliser le fait que pour tout recouvrement ouvert ( U i ) i I {\displaystyle \left(U_{i}\right)_{i\in I}} d'un espace métrique séquentiellement compact X, il existe au moins un nombre de Lebesgue, c'est-à-dire un réel r > 0 tel que toute boule ouverte de X de rayon r soit incluse dans au moins l'un des ouverts du recouvrement. Formellement :

r R + x X i ( x ) I B ( x , r ) U i ( x ) {\displaystyle \exists r\in \mathbb {R} _{+}^{*}\quad \forall x\in X\quad \exists i(x)\in I\quad B\left(x,r\right)\subset U_{i(x)}} .

Soit alors X un espace métrique séquentiellement compact, prouvons qu'il est compact[4]. Soit ( U i ) i I {\displaystyle \left(U_{i}\right)_{i\in I}} un recouvrement ouvert de X et soit r un nombre de Lebesgue pour ce recouvrement. Par précompacité, il existe une partie finie Y de X telle que X = x Y B ( x , r ) {\displaystyle X=\bigcup _{x\in Y}B\left(x,r\right)} . On en déduit alors que la sous-famille finie ( U i ( x ) ) x Y {\displaystyle \left(U_{i\left(x\right)}\right)_{x\in Y}} recouvre X.

Notes et références

  1. D. Guinin et B. Joppin, Analyse MPSI, Bréal, (lire en ligne), p. 126-127.
  2. F. Denizet, Analyse MPSI, Nathan, (lire en ligne), p. 108.
  3. Démonstration de cette version faible du théorème de Bolzano-Weierstrass sur Wikiversité.
  4. Pour une variante, voir (en) Jacques Dixmier (trad. du français), General Topology [« Topologie générale »], Springer, (lire en ligne), p. 52.

Voir aussi

Sur les autres projets Wikimedia :

  • Espaces métriques compacts, sur Wikiversity

Article connexe

Lemme de Cousin

Bibliographie

  • Georges Skandalis, Topologie et analyse 3e année, Dunod, coll. « Sciences Sup », 2001
  • Claude Wagschal, Topologie et analyse fonctionnelle, Hermann, coll. « Méthodes », 1995
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